La peine laisse place à la douleur, comme le manque d'étreinte poignarde le coeur. Le toucher physique a quelque chose de réparateur, je crois. Du moins, son absence fait certainement mal. Je ne savais pas que l'invisible faisait aussi mal. Les gens disparus, les époques révolues, une maison brûlée, des souvenirs remplacés par des condos vides, des champs de cancers, puis des écrans 4K. J'ai mal à mon absence. Je suis invisible.
La douleur de "ne pas" n'arrête jamais car l'idée du manque à combler n'a de limite que l'imagination. Si même le frigo plein, les amis autours et les errances du samedi ne suffisent pas à me contenter, c'est parce que je pense à ce que je n'ai pas. Je ne suis jamais présent, car je suis dans la douleur du manque inconnu. J'attendrai toujours d'aller mieux pour faire quelque chose et c'est pour cela qu'en 30 ans j'ai si peu de vécu.
Vient en moi l'idée chaleureuse de m'exhiber sans gêne, dans un élan de folie qui me permettra de casser le mur, ce mur invisible qui me fait mal et m'isole depuis toujours. Peut-être qu'après tout ce temps à voir la folie du monde, je peux comprendre qu'il n'y a aucune honte à être quelqu'un.