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La neige


Déchet(s) recommandé(s)

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Décembre.

C'est ce mois qui me pousse toujours à tomber sur la réalité brûlante et déchirante ; ce mois qui, après tant d'années, me souffle toujours à l'oreille les paroles glacées de sagesse ; ce mois qui fendille mon âme sans gêne, sans regret et sans pitié. Ce sont les effets ressentis une fois la rosée du matin mariée avec mes poumons, transformant mon oxygène en cristal.

Je me souviens encore. Quand j'étais petit, je fêtais Noël. Un sapin blanc dans le salon, avec quelques lumières colorées pour éclairer le tout et, à côté, la porte menant au balcon. Je sortais toujours pour voir si le Père Noël allait venir d'avance. Mes pieds étaient toujours rouges, mais ça en valait la peine : j'allais le voir ! me disais-je... mais je ne l'ai jamais vu. Toujours les cadeaux venaient, toujours j'étais réveillé, mais jamais je ne l'ai aperçu.

Je me souviens encore. Quand j'étais plus jeune, je suis tombé amoureux pour la première fois. Cheveux en filament d'or, aura surpassant une déesse, sourire aveuglant de bonheur, humeur paralysant mon esprit : tout y était. Je refusais à mes débuts, et je persistais dans le refus. « Non, non ! Jamais ! » me disais-je. Ce fut ma tourmente, ma raison de vivre, ma drogue naturelle et jamais je n'ai pu m'en approcher.

Je me souviens encore. Quand j'étais jeune, j'étais le plus aimé de mon secondaire. Les professeurs me posaient des questions pièges sans réussir à m'avoir ; les élèves venaient me rejoindre dans l'agora à l'heure du midi, sur les bancs, pour discuter ; la direction m'offrait du travail pour surveiller les corridors où les plus jeunes flânaient. Trois dernières années chargées de plaisirs m'ont laissé partir les mains vides.

Je me souviens encore. Quand j'étais jeune adulte, j'ai fait ma première action politique. Jours après jours, nuits après nuits, nombreuses lectures, nombreuses interventions, plusieurs obstacles et plusieurs menaces, j'ai apporté la grève étudiante. L'administration désirait me renvoyer ; les professeurs terrorisaient leurs élèves ; les étudiants nous menaçaient de mort. Autant de mois intensifs à lutter pour une gratuité scolaire, et j'ai payé mon université.

Aujourd'hui, je vais me souvenir. Maintenant je suis adulte et je ne vais pas être chez moi. Je remémore mes journées du passé, je me réveille les nuits en sursaut et j'espère vivre les lendemains. Je garde fermement mon Coran et ma Bible sur moi, mes bottes bien nouées et mon casque sévèrement attaché. Tirs de mortiers la nuit, attaques à la bombe la journée, je sais que dans ce désert fini, je ne verrai plus jamais la neige.

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