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Extraits de Lectures


1984
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Déchet(s) recommandé(s)

Citation

La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles ;
L'homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l'observent avec des regards familiers.

Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.

Il est des parfums frais comme des chairs d'enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
— Et d'autres, corrompus, riches et triomphants,

Ayant l'expansion des choses infinies,
Comme l'ambre, le musc, le benjoin et l'encens,
Qui chantent les transports de l'esprit et des sens.

 

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  • 4 semaines plus tard...

J'ai pensé à Carlos en lisant Finkielkraut parler de galanterie dans L'identité malheureuse :

« Et n'oublions pas non plus ce que les rituels minuscules comme céder le pas, régler les consommations, tenir la porte doivent au besoin d'expier le privilège de la force par la délicatesse du comportement. « Tout homme de goût et d'une certaine élévation d'âme doit avoir le besoin de demander pardon du pouvoir qu'il possède », écrit Mme de Staël. Et ni la libéralisation des mœurs ni les progrès de l'égalité n'ont abrogé cette modalité du devoir.

Mais la galanterie n'est pas seulement égard pour la fragilité. Elle est surtout tribut à la féminité. Elle procède d'une connivence sur le fait que les femmes plaisent et qu'il est licite sinon recommandé de leur rendre hommage. Le galant homme ne se jette pas sur les femmes, il s'oblige à les séduire à leur mode, suivant les règles qu'elles fixent : il les drague en leur faisant la cour. D'ailleurs, s'il s'agit toujours de séduction, il ne s'agit pas toujours de drague. La galanterie est une atmosphère avant d'être une entreprise, une convention avant d'être une conquête, un jeu gratuit avant d'être un comportement intéressé, un rôle que l'on tient, une représentation que l'on donne, une furtive caresse verbale, un petit cérémonial auquel on se plie sans projet défini, comme ça, pour le plaisir, pour la forme et parce qu'on ne sait jamais. »

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  • 4 mois plus tard...

@Ecce Homo Je me souviens de ton rejet de papy Freud, que j’adore. Connais tu Malaise dans la culture ? Je trouve que ce livre est un monument, on l’etudait en cours de philosophie. Ton avis est attendu, personnellement je trouve l’oeuvre Visionnaire pour un ouvrage de 1929. Quelques extraits ici, évidemment tu peux ne pas donner ton opinion sur tous.

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il t'a marquée mon commentaire sur Freud ! j'ai fait une petite recherche et il date de 2013, quand même. :)

c'est difficile de ne pas faire mention de Freud dans l'enseignement des sciences sociales. son oeuvre est vraiment caractéristique du courant moderniste qui accorde une prépondérance à la notion de conscience de soi. en plus de cela, il est le fondateur de la psychanalyse, dont le cadre théorique est utilisé en psychologie. alors, bon, il faut quand même rendre à César ce qui est à César.

par contre, je pense qu'il faut faire attention de ne pas abuser de cet auteur-là, notamment quand on cherche à approfondir des notions comme la sexualité humaine ou les relations de pouvoir. il faut comprendre qu'il était un précurseur pour son époque et qu'il a tenté de conceptualiser des notions complexes à partir de pas grand-chose. par exemple, son point de référence quand il aborde la sexualité est l'existence d'une nature humaine, par lequel il exprime ni plus ni moins un préjugé social à l'effet que l'homme est libidineux et violent. toute son approche concernant la sexualité est très patriarcale, en fait, et son oeuvre contient beaucoup d'idées boiteuses et de raccourcis intellectuels qui, je pense, découlent d'une approche "essentialiste" de ces question. depuis Freud, plusieurs auteurs ont abordé ces idées de façon plus satisfaisante. si tu t'intéresses aux sujets de Freud, tu pourrais aussi lire Foucault ?

mais bon, je suis d'accord pour dire que papy Freud est un incontournable quand on s'intéresse un tant soit peu aux sciences sociales. 

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Après le lycée, je t’avoue que j’ai été feignante en terme de lectures philosophiques. Je n’ai jamais lu Foucault et si je me repose autant sur Freud, c’est parce qu’il touche ma petite personne sur beaucoup de mes petits intérêts. 

Son approche doit quand même être remise humblement dans son contexte, celui d’un 20eme siècle balbutiant sur les questions de conscience de soi, comme tu dis justement. D’ailleurs, il semble qu’il ait remis en question beaucoup de ses écrits de son jeune temps, mais on évoque rarement cette qualité là. 

Tu sais, je suis adapte de vulgarisation et d’ouverture aux néophytes, parce que l'éducation autour de ces questions me semble essentiel. C’est une approche que j’avais en philo et qui m’amenait à briller dans cette matière ( la seule avec le français et l’art plastique où j’avais des facilités, honnêtement je ne brillais pas du tout ailleurs, j’ai toujours été relativement médiocre ou passable dans les autres matières ) et c’est ce que j’apprécie avec mon Sigmund.

Je me souviens dans ton intervention à son sujet que tu critiquais le complexe de l’oeudipe, c’est toujours le cas ? 

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je peux comprendre qu'il t'interpelle par les sujets qu'il aborde (l'univers du symbolisme par exemple) et aussi son approche intuitive (il a souvent recours à l'auto-analyse par exemple). ça explique sûrement aussi sa popularité en général. le problème, c'est vraiment la démarche qui mène au raisonnement. ce n'est souvent pas très rigoureux et ça a tendance à tomber dans la facilité. mais bon, ça n'empêche pas qu'il soit plaisant à lire pour certains et qu'il puisse dire des choses intéressantes ici et là. surtout, ça ne l'empêche pas d'avoir énormément contribué en psychologie.

pour Oedipe, je ne me souviens pas de l'avoir abordé sur le forum ? bon, c'est une autre théorie qu'il a développée par l'auto-analyse. ça n'empêche pas que ça puisse exister chez l'enfant, il l'a d'ailleurs constaté chez lui-même. mais ça n'a pas la prétention d'être universel, enfin je l'espère. personnellement je n'ai pas du tout vécu ça et ça m'est complètement étranger. autrement, je ne suis pas psychologue ni pédiatre alors je ne m'hasarderai pas à t'en dire plus. t'en penses quoi ?

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@Ecce Homo Excuse moi d’avoir mis autant de temps à répondre, j’avais envie de le faire bien mais je ne trouvais aucun moment pour vraiment écrire « bien », justement. Attention je me suis pas foutue de ta gueule, et même si tu mets un mois tu as intérêt à répondre ! 

Tu as tout à fait raison, Freud me touche parce que nous avons des points communs. Avant même de connaître son existence je farfouillais dans les mythes, dans les symboliques diverses, où je ressentais de larges principes archaïques et d’archétypes qui me semblaient parler de l’homme dans son ensemble et dans certains de ses aspects les plus primitifs. Comme lui, je suis une grande adapte de Platon, à qui il a piqué pas mal de choses, et qui essentialisait le discours de Socrate que les désirs et l’amour, un thème qui me tient toujours à cœur. 

L’auto analyse est limitée, et forcément, tout égocentrisme ramène à une bulle hermétique qui tôt ou tard montre ses faiblesses. Cela dit, il avait compris que s’il ressentait certaines choses, d’autres devaient les ressentir aussi. Au niveau du champ d’exploration, c’est là qu’il a montré une clairvoyance et un esprit remarquable. S’attaquer aux rêves alors que personne n’a d’explication sur la plupart d’entre eux, c’est téméraire. S’attaquer aux retorts de l’esprit, et découvrir une découverte pareille, celle de l’inconScient, cela ne pouvait arriver que par l’auto analyse. Parce que l'inconscient relève de l’intime en soi, de ce qu’il y a de plus enfoui et sauvage, et je crois, à mon humble connaissance, que personne n’a jamais eu l’insight d’y songer.

Même Descartes qui se figurait le rêve comme une illusion des sens, et qui se raccrochait au « je » du sujet, n’a jamais questionné le pourquoi des illusions de l’esprit. Freud, lui, est allé confronter des cadavres. Je vais te donner un exemple de mes propres auto analyses et de leur efficacité sur moi même, dans un champs d’expérience mentale que chacun à peu près peu expérimenter dans sa vie : les angoisses, par exemple, ou la peur en général.

Révélation

 

Il y a quelques temps, alors que je fréquentais un idiot, j’ai eu des angoisses puissantes. J’ai du quitter le travail, parce que ça me retournait le ventre. J’avais beau respirer et pratiquer le détachement de mes pensées, les angoisses étaient extrêmement prenantes et m’ont forcée à rentrer chez moi. J’ai alors commencé un travail de méditation, de respiration, d’auto sécurisation ( en parlant doucement a moi même, technique qui m’a souvent aidée à relâcher) et je m’endors une première fois. Là, cauchemard affreux. Je suis un tigre, je me cache dans l’eau, mais tout le monde veut me tuer. Je me bats à la mort. Je sors du rêve avec l’angoisse à nouveau, je recommence ma technique de lâcher prise. Je réussis à me détendre ( et je sens carrément les nerfs lâcher, comme une crampe qui se détend) et je me rendors. Boom, deuxième rêve chaotique. Je ne sais plus ce qu’il y avait dedans, mais je me retrouve à nouveau à devoir répéter mon stratagème de détente. Et je me rendors. En tout cas, je constate le lendemain que mes angoisses refusaient littéralement de m’abandonner. Pourquoi donc ? 

Je repense à cette vidéo sur l’anxiété. Elle est incroyable. Cette personne fait exactement ce que tout le monde fait face à l’anxiété, comme moi qui essayait de la chasser à tout prix, et bien : elle l’a rejette. C’est bien là l’erreur que fait toute personne en prise avec ses émotions. Au lieu de les accepter, elle les rejette. Et c’est, très exactement, ce qui fait revenir l’émotion en deux fois plus fort. Sauf que l’emotion, comme l’anxiété, les angoisses, ce n’est qu’un moyen qu’à ton corps et ton esprit de chercher à se protéger. Pourquoi se protéger de quelque chose qui cherche justement, à nous protéger ? C’est là que j’ai eu le déclic.

En imaginant, en symbolisant, en analogisant les choses, on y voit souvent plus clair. Freud pratiquait la suggestion, il avait compris qu’en imageant, on pouvait trouver la solution. 

Dans la vidéo, la jeune fille ne dompte son angoisse que lorsqu’elle l’accepte dans sa vie, et qu’elle lui dit elle même: «  Ne t’inquiète pas ». C’est elle qui prends le contrôle de la situation en rassurant son crocodile, car lui, tout ce qu’il souhaite, c’est de la protéger. Le crocodile n’est en fait qu’une intuition qui s’affole et qui devient alors une peur sans raison extérieure. Mais lui, il sait qu’a l'intérieur, un mécanisme s’opère dans l’unique but de protection du sujet. 

J’avais compris que mes angoisses, que j’appelais mes crocodiles ? ne voulaient que mon bien, et c’est à ce moment là que j’ai commencé à les AIMER. Oui, parce qu’aimer ses angoisses, c’est s’accepter et s’aimer, et encore mieux, c’est s’écouter vraiment.

il s'avèrera que cette nuit là, le garçon que je fréquentais couchait avec une autre fille a des centaines de kilomètres de là. Mais ce n’est qu’un détail, parce que les signes subtils autour de moi ont amené ces angoisses de façons logique sans que je ne les voient vraiment venir, et c’est seulement mon corps et mon inconscient qui ont réagi pour me donner l’alarme.

Sauf que depuis cette histoire, en Septembre dernier, je n’ai plus jamais eu d’angoisses. Je pense que la projection de l'idée même de l’angoisse, de la polarité négative à positive par la force de l’imaginaire, m’ont permises de ne plus jamais considérer ces angoisses que comme des crocodiles bienveillants. Comment aurais-je pu me sentir menacée ? La guérison par l’esprit passe par une transmutation des idées, des émotions qui sont des idées, des ressentis qui sont des émotions qui traduisent des idées. Inconscientes ou non. 

Pour tout ce qui a trait à la guérison mentale ( sans parler des psychoses, et des névroses sévères évidemment) je pense que le travail ne peut être accompli par une tierce personne, elle doit forcément venir de la volonté interne du sujet lui même de se sonder pour guérir. C’est simple, sans un tel travail sur soi, rien est possible. Il n’y a pas de sauveur venant de l’extérieur car toutes les ressources de soin se trouvent à l'intérieur.  

D’ailleurs le symbolisme du guérisseur dans la plupart des mythes est toujours lié à la souffrance même du guérisseur qui apprends d’abord à se soigner avant de pouvoir soigner autrui.

 

 


 

Alors évidemment que ces méthodes ne sont pas rigoureuses, mais elles ont au moins le mérite d’amener un débat, une ouverture et une réflexion que chacun peut étayer de façon différente. C’est bien pour ça que Freud est plus un philosophe qu’un Médecin. C’est Michel Onfray qui le dit, et je pense qu’il a à moitié raison. Ce qu’Onfray devrait accorder, c’est qu’il n’en sait pas plus, 70 ans plus tard. Facile de critiquer un dude qui a galéré dans la panade sur un sujet quasiment vide de réflexion avant lui. Je comprends du coup pourquoi les enfants de la psychologie de Sigmund tiennent tant à garder l’honneur de leur père intact. 

Pour ce qui est du complexe d’Oedipe, je pense que c’est un monument des psychologies familiales. En revanche, Freud parle d’Oedipe intégré, d’Oedipe blessé, et toujours d’inconscient. En revanche cela ne veut pas forcément dire que la culture n’a pas son mot à dire, ni que l’Oedipe est toujours vécu de façon agressive. Petite j'étais choquée d’une chose, c’est que toutes les gamines en dessous de mon âge à l’école et qu’on aimait traiter comme nos poupées attitrées ( sans rire, on était comme avec des animaux de compagnie, on était plus grandes qu’elles et on avait chacun notre petite protégée) parlaient de se marier avec leur papa.

Je t’avoue que ça me choquait profondément. Je m’en souviens comme d’une hérésie à mon jeune age, et je me souviens même avoir même dit «  mais tu peux pas, c’est ton père !!! C’est dégoûtant ». Mais ça ne choquait pas beaucoup d’entres elles. Par la suite, j’ai aussi vu mon frère développer un lien particulier avec ma mère, comme un favoritisme. Moi je n’avais pas ce lien avec mon père, parce que c’était le caractère de mon père, mais ma mère prenait tous les câlins de bébé de mon frère et était sa sauveuse ultime.

J’ai observé des similitudes dans beaucoup de liens mère fils. Certaines fois dans des liens pères filles, mais honnêtement, l’inverse est drastiquement plus remarquable. Le thème de la jalousie entre la belle mère et la mère, ça vient totalement de là. Je pense que c'est culturel d’une part, mais de l’autre, je pense que c’est un archétype inconscient des liens d’affects qui frôlent l’absolu incestueux, non consciemment.

Ma mère a subi sa belle mère haineuse, pour autant, ma grand mère n’a jamais fait subir cela aux gendres de ses filles. J’en ai moi même été victime dans une relation, une mère jalouse. Le schéma s’est tellement vu et répété que je pense que c’est un archétype psychosocial, on le retrouve également au cinéma. De façon fréquentes, les mères ont un rapport fusionnel avec leur fils. On trouve cela dans la culture juive, italienne, musulmane...

Elle dépasse les contraintes éthiques et religieuses. De même que l’archetype de la vierge et de la putain, dont Freud a parlé, montre que la culture occidentale distingue une épouse selon sa nature de mère, représentation de là sienne propre - virginale, blanche, pure et surtout asexuée- et la putain, la femme fatale, la prostituée, l’être avilie par une sexualité aussi désirable que rabaissée.

Il parle d’objet sexuel rabaissé, par opposition à la pureté de la mère qui lui a fait le cadeau sacré de la vie. Marie n’est elle pas vierge tout en ayant enfanté ? Nous voyons bien que cet archétype est profondément ancré dans l’imaginaire collectif sans que les gens ne le conçoivent consciemment.

L’oedipe doit être digéré selon Freud. C’est une phase qui doit amener à la maturation sexuelle après avoir pris le parent du même sexe comme modèle puis comme rival symbolique, pour amener le sujet à créer un couple d’après ce modèle ( la vision est binaire et ne comprends pas tous les modèles de couple, mais eh, on était début 20e hein) et je pense que les polarité masculines et féminines s’inscrivent même au sein des couples homosexuels, indépendamment de la définition de genre que la société peut leur donner. 

L’oedipe digéré, il n’y a normalement plus de traces de lui. Mais si un traumatisme survient jeune, et que l’Oedipe est blessé, il y a de fortes chances pour que l’impact sur le sujet soit fort. Le profilage des serial killer et des prédateurs sexuels a amené bien des conclusions allant dans ce sens: les parents c’est vraiment important pour qu’un esprit sain s'établisse et aie une identité sexuelle stable et harmonisée. 

 

 

 

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  • 8 mois plus tard...

Je suis allé partout dans le pays, sans autre idée que de changer toujours d'endroit. J'ai racolé des étrangers dans toutes les villes où j'ai passé. Pour moi, cela signifiait seulement de l'argent, un endroit pour dormir, de quoi boire et de quoi manger. Je n'ai jamais pensé que pour eux, ça pouvait avoir un autre sens. Maintenant, toutes ces lettres, comme la vôtre, me le prouvent. J'ai compté énormément pour des centaines de gens dont les visages et les noms me sont sortis de la tête dès que je les ai quittés. J'ai comme l'impression d'avoir laissé des dettes. Je ne parle pas d'argent, mais de sentiments. Quelquefois, je me suis mal conduit. Parti sans même dire au revoir, malgré tout ce qu'ils avaient fait pour moi. Et j'ai même pris des choses qu'on ne m'avait pas donné. Je ne peux pas imaginer qu'ils puissent me pardonner. Si je l'avais su, alors, quand j'étais dehors, qu'on pouvait trouver de vrais sentiments, même chez des inconnus, chez les gens que je trouvais pour me faire vivre, j'imagine que j'aurais compris que ça valait le coup de vivre. De toute façon, la situation est maintenant sans espoir. Tout sera fini pour moi dans très peu de temps.
 

Le boxeur manchot, Tennessee Williams

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Émile Durkheim, Le Suicide

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À surveiller les prochaines années, donc.

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Pump It Mic Drop GIF by FullMag

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Lol on a pas appris grand chose depuis 1897, hein

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Révélation

 

De ce chapitre se dégagent deux conclusions importantes. En premier lieu, nous y voyons pourquoi, en général, le suicide progresse avec la science. Ce n'est pas elle qui déter­mine ce progrès. Elle est innocente et rien n'est plus injuste que de l'accuser ; l'exemple du juif est sur ce point démonstra­tif. Mais ces deux faits sont des produits simultanés d'un même état général qu'ils traduisent sous des formes différentes. L'homme cherche à s'instruire et il se tue parce que la société religieuse dont il fait partie a perdu de sa cohésion ; mais il ne se tue pas parce qu'il s'instruit. Ce n'est même pas l'instruction qu'il acquiert qui désorganise la religion ; mais c'est parce que la religion se désorganise que le besoin de l'instruction s'éveille. Celle-ci n'est pas recherchée comme un moyen pour détruire les opinions reçues, mais parce que la destruction en est commencée. Sans doute, une fois que la science existe, elle peut combattre en son nom et pour son compte et se poser en antagoniste des sentiments traditionnels. Mais ses attaques seraient sans effet si ces sentiments étaient encore vivaces ; ou---plutôt, elles ne pourraient même pas se produire. Ce n'est pas avec des démonstrations dialectiques qu'on déracine la foi ; il faut qu'elle soit déjà profondément ébranlée par d'autres causes pour ne pouvoir résister au choc des arguments.

Bien loin que la science soit la source du mal, elle est le remède et le seul dont nous disposions. Une fois que les croyances établies ont été emportées par le cours des choses, on ne peut pas les rétablir artificiellement ; mais il n'y a plus que la réflexion qui puisse nous aider à nous conduire dans la vie. Une fois que l'instinct social est émoussé, l'intelligence est le seul guide qui nous reste et c'est par elle qu'il faut nous refaire une conscience. Si périlleuse que soit l'entreprise, l'hési­tation n'est pas permise, car nous n'avons pas le choix. Que ceux-là donc qui n'assistent pas sans inquiétude et sans tris­tesse à la ruine des vieilles croyances, qui sentent toutes les difficultés de ces périodes critiques, ne s'en prennent pas à la science d'un mal dont elle n'est pas la cause, mais qu'elle cherche, au contraire, à guérir! Qu'ils se gardent de la traiter en ennemie ! Elle n'a pas l'influence dissolvante qu'on lui prête, mais elle est la seule arme qui nous permette de lutter contre la dissolution dont elle résulte elle-même. La pros­crire n'est pas une solution. Ce n'est pas en lui imposant silence qu'on rendra jamais leur autorité aux traditions dispa­rues ; on ne fera que nous rendre plus impuissants à les rem­placer. Il est vrai qu'il faut se défendre avec le même soin de voir dans l'instruction un but qui se suffit à soi-même, alors qu'elle n'est qu'un moyen. Si ce n'est pas en enchaînant artificiellement les esprits qu'on pourra leur faire désapprendre le goût de l'indépendance, ce n'est pas assez de les libérer pour leur rendre l'équilibre. Encore faut-il qu'ils emploient cette liberté comme il convient.

En second lieu, nous voyons pourquoi, d'une manière géné­rale, la religion a sur le suicide une action prophylactique. Ce n'est pas, comme on l'a dit parfois, parce qu'elle le condamne avec moins d'hésitation que la morale laïque, ni parce que l'idée de Dieu communique à ses préceptes une autorité exception­nelle et qui fait plier les volontés, ni parce que la perspective d'une vie future et des peines terribles qui y attendent les cou­pables donnent à ses prohibitions une sanction plus efficace que celles dont disposent les législations humaines. Le protes­tant ne croit pas moins en Dieu et en l'immortalité de l'âme que le catholique. Il y a plus, la religion qui a le moindre pen­chant pour le suicide, à savoir le judaisme, est précisément la seule qui ne le proscrive pas formellement, et c'est aussi celle où l'idée d'immortalité joue le moindre rôle. La Bible, en effet, ne contient aucune disposition qui défende à l'homme de se tuer et, d'un autre côté, les croyances relatives à une autre vie y sont très indécises. Sans doute, sur l'un et sur l'autre point, l'enseignement rabbinique a peu à peu comblé les lacunes du livre sacré ; mais il n'en a pas l'autorité. Ce n'est donc pas à la nature spéciale des conceptions religieuses qu'est due l'in­fluence bienfaisante de la religion. Si elle protège l'homme contre le désir de se détruire, ce n'est pas parce qu'elle lui prêche, avec des arguments sui generis, le respect de sa per­sonne ; c'est parce qu'elle est une société. Ce qui constitue cette société, c'est l'existence d'un certain nombre de croyances et de pratiques communes à tous les fidèles, traditionnelles et, par suite, obligatoires. Plus ces états collectifs sont nombreux et forts, plus la communauté religieuse est fortement intégrée ; plus aussi elle a de vertu préservatrice. Le détail des dogmes et des rites est secondaire. L'essentiel, c'est qu'ils soient de nature à alimenter une vie collective d'une suffisante intensité. Et c'est parce que l'Eglise protestante n'a pas le même degré de consistance que les autres, qu'elle n'a pas sur le suicide la même action modératrice.

 

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Il n’y a pas de régime de religiosité qui dure éternellement. Vient un temps où un ensemble national connaît une transformation du type de religiosité dominante qui le caractérise. Ces changements obéissent à une périodicité qui est propre à chacune des régions et, en un sens, à chacun des régimes eux-mêmes. Ceux-ci définissent ainsi des « moments » (Rosanvallon, 1985) au sens d’une configuration sociohistorique particulière marquant l’univers religieux d’une région, d’une province ou d’une nation. Ces « moments » peuvent durer de nombreuses décennies, parfois moins. Ils introduisent des types de société qui sont à leur tour à la fois produits et producteurs de nouveaux régimes de religiosité (et de laïcité). Bref, on peut lire l’histoire d’une société en filigrane de la permanence et de la transformation du régime de religiosité qui la caractérise durant une période de son existence.

 * * *

Avec la Révolution tranquille, le Québec a nettement marqué sa rupture avec le régime ethno-religieux simple qui s’était constitué depuis 1840 jusqu’à 1960. En témoignent de nombreux indicateurs, dont la baisse spectaculaire du taux de pratique religieuse hebdomadaire qui, en moins de 20 ans, a chuté de presque 60 %. Nous l’avons dit, cette rupture ne marque ni la pleine sécularisation de la société, ni la fin du catholicisme au Québec. Elle met toutefois de l’avant un nouveau régime de religiosité distinguant l’identitaire du strictement confessionnel et l’appartenance de l’observance de la pratique religieuse, mais sans pour autant disqualifier le catholicisme comme lieu d’inscription sociohistorique et comme tradition significative pour la nation et sa destinée. Fruit d’un concordat implicite (Meunier et Laniel, 2011) entre l’Église et l’État, le catholicisme culturel a été le régime de religiosité du moment post-Révolution tranquille. L’analyse de nos indicateurs montre que ce moment aurait duré près de 40 ans, des années 1960 aux années 2000. Depuis, certains indicateurs clés de ce type de religiosité instituée, comme l’appartenance ou même le taux de baptêmes par rapport aux naissances totales, ont connu des baisses significatives avec l’arrivée de la génération Y, baisses synchroniques avec une augmentation de l’immigration exogène au corpus chrétien, notamment dans les villes – Montréal en tête (Rousseau et Castel, 2006). Sans affirmer pour cela que le Québec serait définitivement sorti du régime de la religion culturelle, force est de constater que ses bases s’effritent et que sa reproduction n’est plus assurée comme auparavant. Difficile pour lors d’affirmer que le futur du Québec sera fait du présent de l’Ontario ou de l’Ouest. Difficile aussi de nier qu’il semble s’en inspirer.

Révélation

É.-Martin Meunier et Sarah Wilkins-Laflamme, Sécularisation, catholicisme et transformation du régime de religiosité au Québec. Étude comparative avec le catholicisme au Canada (1968-2007). Recherches sociographiques - Catholicisme et laïcité au Québec. Volume 52, numéro 3, Septembre–Décembre 2011

 

 

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MARTINIELLO, Marco, La démocratie multiculturelle, Paris, Presses de Science Po, 2011
Chapitre 1: La problématisation de la diversité culturelle et identitaire

Citation

 

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sont criantes, qu'elles se révèlent durables et semblent irréversibles, tôt ou tard ceux qui sont convaincus de ne rien avoir à perdre exprimeront leur frustration, leur haine, leur sens du "no future".

 

 

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  • 2 semaines plus tard...

Coucou! Je dois me discipliner en fin de semaine pour réussir à extirper 3,000 mots de deux maigres paragraphes, mais je prends quand même le temps de venir partager le good shit de mes lectures obligatoires pour ceux qui sont en mesure d'en voir l'intérêt (j'te regarde, @Ecce Homo:

 

Citation

Refuser la modernité et son idéal d’universalisme, c’est peut-être, dans certains cas, refuser la domination. Car les revendications ethniques sont moins des relents de la prémodernité qu’une réaction aux nouveaux rapports de domination qui s’instaurent avec l’avènement de la modernité.

La sociologie n’échappe pas à cette manière de penser, et si elle n’est pas fille du colonialisme, elle en est indissociable, se construisant du côté des colonisateurs. Elle partage, dès ses débuts, ce biais de la pensée moderne en quête d’un universalisme et d’une homogénéité qui seraient les garants de l’égalité, d’où son penchant pour l’assimilationnisme. Convaincue que l’ethnicité est un vestige appelé à disparaître, et le plus tôt sera le mieux, elle ne cherchera pas, voire elle renoncera, à la théoriser. Elle en serait d’ailleurs bien incapable, aveugle qu’elle est aux rapports sociaux inégaux à partir desquels l’ethnicité s’édifie.

Danielle Juteau, L'ethnicité et ses frontières, p. 141

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Le 2021-02-20 à 21:17, Retromantique a dit :

Refuser la modernité et son idéal d’universalisme, c’est peut-être, dans certains cas, refuser la domination. Car les revendications ethniques sont moins des relents de la prémodernité qu’une réaction aux nouveaux rapports de domination qui s’instaurent avec l’avènement de la modernité.

Elle est pertinente en torrieux. J'imagine qu'elle sous-entend les structures tribales de ces ethnies. On commence à s'y réintéresser aujourd'hui, avec un plus grand désir de le faire de rapport égal, mais c'est loin d'être gagné. Y'a qu'à penser aux si incomprises et enfouies cultures autoctones d'ici. On a des croutes à manger.

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il y a 8 minutes, Retromantique a dit :

Par quoi sous-entendrait-elle ça?

Par la prémodernité réactionnaire. On parle de l'opposé de l'universalisme et de l'homogénéité, donc des tribus. C'est comme ça que je l'avais compris.

Citation

L'usage du terme tribalisme est très largement péjoratif. Le vocabulaire qui lui est le plus fréquemment associé est négatif ou dépréciatif : les haines, les oppositions, les luttes, les éclatements (tribalistes) connotent un champ sémantique confus et opaque. Le tribalisme devient un cadre vide et formel qui se trouve défini par ses qualificatifs.

Même sans le vouloir, ceux qui parlent des valeurs négatives et positives du tribalisme insistent tant sur les premières que les secondes paraissent bien dérisoires. Ainsi, l'anthropologue britannique P. C. Lloyd mentionne « l'hostilité et la rivalité ethniques » et affirme que « l'exclusivisme ethnique procure une base toute prête à des mouvements politiques séparatistes ». Comment, dans ces conditions, penser l'identification ethnique comme un instrument de la construction nationale ! Le tribalisme serait donc, avant tout, une forme dépassée ou inadaptée de la cohésion sociale. Les théoriciens de l'anthropologie appliquée, comme L. Mair ou B. Malinowski, ont pu cautionner une telle interprétation qui ignore les conséquences complexes de la domination coloniale. Leur vision étroitement fonctionnaliste les conduit à concevoir le tribalisme comme l'expression d'une unité autonome et autarcique, qui refuse et méconnaît le « contrôle extérieur » (c'est-à-dire en fait le pouvoir colonial). C'est ainsi que naît la dichotomie politique qui oppose le tribalisme (particulariste-conservateur) au nationalisme (universaliste-novateur).

 

 

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Je ne pense pas qu'elle penserait en terme de tribalisme, non. Elle parle toujours en terme d'ethnicité, et pour elle, tant la majorité que les minorités sont des ethnicités. L'universalisme n'est que l'illusion de la majorité, un prétexte pour assimiler l'Autre. 

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  • 3 semaines plus tard...

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:love:

Raphaël FREDDY, 2010. « Weber Max, 1864-1920 » dans Dictionnaire des faits religieux, Régine AZRIA et Danièle HERVIEU-LÉGER (dir.), Paris : Presses Universitaires de France, p. 1289-1292.

 

 

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